Condamné à de la prison ferme pour le coup de poing fatal à Clermont-Ferrand en 2016
Pour avoir donné un coup de poing ayant entraîné la mort de Jean-Marc Villatte en juin 2016, Jérémy Kluczny a été condamné, ce mercredi soir, par la cour d’assises du Puy-de-Dôme.
Depuis trois jours, Jérémy Kluczny ne dévie pas : « J’ai juste riposté. Il s’est tourné vers moi. Vu son gabarit, j’avais peur de m’en ramasser une bien. Il m’a mis un revers et mon geste a été automatique, un coup réflexe. Je l’ai pas tapé sans raison. » Le Ligérien n’en démord pas. Mimant la scène, encore et encore. Sans sourciller.
« J’ai pas l’impression d’être un criminel »Puis de lâcher, enfin, juste avant la clôture des débats, la notion qui transparaît depuis lundi : légitime défense. « J’ai pas l’impression d’être un criminel. » Un argument qui fait bondir les parties civiles. « Il y a de l’indécence, c’est pitoyable. Venir soutenir la légitime défense, c’est dire que vous avez été victime d’une agression. Jean-Marc ne vous a jamais agressé et vous n’avez jamais riposté de manière proportionnée. La seule finalité, c’est fuir vos responsabilités », oppose Me Renaud Portejoie. « Jean-Marc n’était pas bagarreur ni agressif », s’offusque à son tour Me Dominique Lardans, rapportant les témoignages des proches du défunt.
En revanche, estime l’avocate générale Éléonore Drummond, « Jérémy Kluczny était énervé, c’est avéré. Il n’a pas porté ce coup pour se défendre ». Néanmoins, dans le même temps, l’accusé explique « mériter » d’aller en prison. Tiraillé entre la culpabilité et les excès d’alcool (il a perdu son permis de conduire deux fois à cause de la boisson et doit comparaître devant le tribunal correctionnel en février).
Légitime défense ?Placé sous contrôle judiciaire dès sa mise en examen, il n’a jamais effectué un seul jour de détention. « Quoiqu’il se passe, j’accepterai et j’assumerai. » Prison ou non, rien n’effacera ce coup de poing porté le 3 juin 2016. Fatidique, irrévocable.
« C’est un immense sentiment de gâchis qui nous berce depuis cinq ans et demi. L’absurdité de la mort d’un homme de 43 ans pour un coup de poing. Peu importe la peine, elle n’atténuera pas les souffrances des parties civiles »
« J’ai pas voulu ça… », répète l’accusé. Un coup fatal, donc. Mais « automatique », d’après la défense. Ses conseils plaident ainsi la légitime défense. « Le geste qu’on lui reproche, il l’a eu, mais dans un contexte particulier car il a répondu à un geste de Jean-Marc Villatte », estime Me Simon Mandeville, en demandant l’acquittement. Renchérissant, Me Évelyne Ribes, rappelle que « depuis le début, il a dit la même chose » et qu’il n’a jamais été placé en détention provisoire.
C’est donc libre que Jérémy Cluczny, solide gaillard, debout sans fléchir derrière la barre, face à la cour, attend de savoir ce qu’il va advenir de lui.
Et c’est finalement menottes aux poignets qu’il quitte la salle d’audience. Conformément aux réquisitions, il est condamné à cinq ans de prison, dont trois avec sursis probatoire. Pas de réaction de la part de l’accusé. Il l’avait annoncé. Les larmes sont réservées à ses proches, venus l’étreindre avant son départ pour la maison d’arrêt.
De l’autre côté, l’émotion est également contenue, pudique. Pas besoin de rajouter de la peine à la peine.
Julien Moreau
« Papa, il a la tête dans les étoiles » Il venait d’être père. Sa fille est née moins d’un mois avant son décès. Le soir des faits, il célébrait sa naissance avec des amis. Rugbyman, puis arbitre, Jean-Marc Villatte était connu dans la région. Sa famille et ses proches sont venus en nombre durant le procès. Il laisse également derrière lui un fils, né d’une précédente union, et une veuve, qui s’exprime à la barre, dignement : « Ça aurait fait dix ans qu’on était ensemble. C’était quelqu’un de gentil, j’ai vécu un rêve avec lui. C’est pas seulement un coup de poing. Derrière, il y a une famille. Ma fille, elle a pas de papa, elle ne l’aura pas connu. Je lui ai dit que son papa était tombé et qu’il s’était fait mal à la tête. Mais un jour, il faudra bien que je lui explique… Elle a 5 ans, elle me dit : “Papa Jean-Marc, je lui fais coucou par la fenêtre, il a la tête dans les étoiles”. »