Le "triste dernier jour" à l'hôpital de Lily, aide-soignante non-vaccinée
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À compter de ce mercredi 15 septembre, elle sera sans métier ni revenu. Rencontre avec une employée roannaise de l'hôpital qui voit sa vie basculer à l'âge de 36 ans.
"C'était ma dernière journée aujourd'hui. Je suis triste, mes patients aussi." Lily*, 36 ans, aide-soignante à la maison de retraite de l'hôpital de Roanne, sur le site de Bonvert, se rendra pourtant bien ce mercredi 15 septembre sur son lieu de travail, à 12 h 30, l'heure à laquelle elle est censée démarrer sa journée. Mais en tant que personne non-vaccinée, il est fort probable qu'on ne la laisse pas travailler. La loi est claire et elle impose désormais l'obligation vaccinale contre le covid-19 des personnels hospitaliers.
Ses grands-parents décédés du covidOr Lily refuse cette vaccination-là, estimant avoir "un corps pas assez costaud et un cœur trop fragile" pour la supporter. D'apparence très frêle, la jeune femme n'est pourtant pas ce qu'on appelle une anti-vax convaincue. Elle se faisait même vacciner contre la grippe ces dernières années, pour protéger les personnes âgées qu'elle côtoyait. Elle n'est pas non plus sceptique quant à l'existence du virus, ayant eu la grande peine de voir ses deux grands-parents, habitant Arfeuilles dans l'Allier, décéder du covid. Elle-même s'est vue mourir l'année dernière après l'avoir attrapé (passant sous la barre des 40 kilos pour 1,63 m), très probablement d'ailleurs dans le cadre de son activité professionnelle.
"Je suis prête à rester confinée sept jours sur sept et 24 heures sur 24 surle site de l'hôpital pour garder mon métier."
Une profession qu'elle exerce depuis 2010 et pour laquelle elle a sacrifié beaucoup de choses : "Pour avoir un CDI, il ne faut pas compter ses heures. On nous demande d'être complètement disponibles, y compris la nuit, les week-ends..." Tout cela pour un salaire peu élevé, mais elle avait la vocation : "J'aime mon métier, je ne veux pas le perdre. Je suis prête à rester confinée sept jours sur sept et 24 heures sur 24 sur le site de l'hôpital pour le garder."
Elle rendra les clés de son appartement à Roanne le 31 octobre : "Après, je serai à la rue"C'est donc avec un certain sentiment d'injustice qu'elle apprend, au téléphone (pendant un coup de fil reçu lors de son témoignage auprès du Pays, N.D.L.R.), devoir probablement affronter un conseil de discipline prochainement. "Il n'y a pas plus douce et gentille que moi", répond tristement cette jeune femme aux traits fins. Avec une voix douce, en effet, contrastant avec la brutalité de sa situation, elle révèle rendre les clés de son appartement à Roanne le 31 octobre : "Après, je serai à la rue". Elle ne touchera pas le chômage à compter du 15 septembre, et envisage donc de loger ensuite dans un camion aménagé.
La Suisse ou le LarzacPour aller où ? Peut-être en Suisse, où l'obligation vaccinale n'existe pas pour les soignants, afin de conserver le même métier. Ou alors dans le Larzac, dans l'idée d'élever des chèvres et de se reconnecter à la nature. Les collègues de Lily espèrent encore la voir changer d'avis et se faire vacciner. Mais cette option ne semble pas envisagée par l'aide-soignante roannaise. Un choix qui, s'il se confirme dans les deux mois à venir, quoi qu'il arrive ensuite, l'interdirait d'occuper à nouveau un poste de titulaire au sein de la fonction publique hospitalière, même bien des années plus tard.
La fin d'une belle histoire d'amour avec ce métier, que j'ai vécue avec beaucoup de passion.
"La fin d'une belle histoire d'amour avec ce métier, que j'ai vécue avec beaucoup de passion. Mais mon mari, le centre hospitalier, m'a quittée." Comme elle n'a pas d'enfant ni de crédit, contrairement à certaines de ses collègues "qui ont adhéré à la vaccination par peur" de tout perdre, Lily essaie de se faire à l'idée de la séparation. Même si elle la vit avec colère, tristesse et "dégoût des choix du gouvernement". Elle qui souhaitait rester dans la voie médicale durant toute sa carrière, "peut-être même devenir infirmière", n'imaginait pas vivre son dernier jour à l'hôpital de cette façon...
(*) prénom d'emprunt
4Le nombre de personnes travaillant dans le service de Lily, à la maison de retraite de l'hôpital, qui, d'après elle, refusent de se faire vacciner. Ce qui risque de poser de sérieux problèmes dans un établissement connaissant déjà, a priori, un effectif plus que limite.