Manipulations génétiques: sonnette d'alarme sur le risque terroriste
Le Conseil national consultatif pour la biosécurité (CNCB) a mis en garde mardi contre un risque de détournement de la biologie de synthèse, par exemple pour reconstituer en laboratoire des bactéries ou des virus dangereux, à des fins terroristes.
En revanche, la technique d'édition du génome CRISPR-Cas9, dite des "ciseaux génétiques", "en l'état de l'art, ne permet pas d'accroître fondamentalement le risque de prolifération d'armes biologiques", a-t-il estimé dans un rapport dont les annexes sont classifiées "secret défense".
"A cet égard", l'outil CRISPR-Cas9 "ne constitue pas un saut technologique majeur susceptible de générer de nouvelles menaces", peut-on lire dans une synthèse du rapport diffusée à la presse.
Découverte en 2012, la technique CRISPR-Cas9 permet d'éliminer et d'ajouter des fractions de matériel génétique avec une extrême précision. Elle est assez facile à utiliser et peu coûteuse.
Créé en août 2015 et composé d'experts, le CNCB a pour mission d'éclairer les pouvoirs publics, la communauté scientifique et la population sur les risques que peuvent présenter les progrès des recherches dans les sciences de la vie, notamment lorsqu'elles sont utilisées à des fins malveillantes.
Il s'est saisi de la question des manipulations du génome à la suite de la publication en 2016 d'un rapport de James Clapper, alors directeur du renseignement américain, dans lequel celui-ci considère que les techniques d'édition du génome peuvent devenir des armes de destructions massives.
"Les conclusions de notre rapport ne sont pas exactement les mêmes" que celles de James Clapper, a souligné le biologiste Antoine Danchin, spécialiste de la génétique microbienne, qui a coordonné les travaux du CNCB sur ce dossier.
"Actuellement, le vrai problème, c'est la question de la reconstruction en laboratoire de microorganismes existants dans la nature", notamment des virus connus pour leur dangerosité, a-t-il dit lors d'un point de presse à l'Académie des Sciences. Il a cité comme exemple la variole.
"Il est devenu très facile d'obtenir des morceaux de génome synthétisés chimiquement et commercialisés", a-t-il dit.
Louis Gautier, secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) et président du CNCB, a souligné que "la révolution génétique implique que l'on ait un plus haut niveau de conscience sur les risques" liés au détournement éventuel de ces techniques.
"Nous savons que malheureusement dans toute une série de domaines où la technologie peut être détournée à des fins nuisibles, Daech a tenté des recherches, a essayé de développer des choses qui pour l'instant sont inabouties heureusement", a-t-il ajouté.
Dans son rapport, le CNCB émet plusieurs recommandations, notamment la sensibilisation des responsables des laboratoires et des chercheurs sur le risque de tels détournements.