Castro: les Etats-Unis perdent leur dernier ennemi de la Guerre froide
Avec la mort de Fidel Castro, les États-Unis perdent leur dernier grand ennemi de la Guerre froide. Mais le "Lider Maximo" était depuis longtemps sorti du jeu et mis à l'écart du rapprochement historique opéré par Barack Obama avec son frère Raul.
Si plusieurs dirigeants européens en visite à Cuba sont allés, ces dernières années, présenter leurs respects à Fidel Castro, les États-Unis l'ont totalement ignoré depuis le début officiel, le 17 décembre 2014, du réchauffement des relations entre les deux pays. Ils ne traitent qu'avec Raul.
Malgré le rétablissement des relations diplomatiques à l'été 2015 et une visite historique du président américain Obama en mars 2016, les relations entre les États-Unis et l'île distante de seulement 150 kilomètres sont loin d'être normalisées. L'embargo économique, imposé depuis 1962 par les Américains, est maintenu et le Congrès à majorité républicaine s'oppose résolument à sa levée.
Invasion ratée de la Baie des Cochons --tentative de renversement du jeune régime castriste par des exilés appuyés par Washington en 1961--, crise des missiles russes qui fit passer le monde à deux doigts d'un troisième conflit mondial: la confrontation a été immédiatement violente entre les États-Unis et Castro, soutenu par l'Union soviétique.
"Ce que les impérialistes ne peuvent nous pardonner, c'est d'avoir fait triompher une révolution socialiste juste sous le nez des États-Unis", dira au début des années 1960 Fidel Castro.
De Dwight Eisenhower à Barack Obama, il fut le contemporain de 11 présidents des États-Unis et n'a eu de cesse se s'ériger en rempart contre le capitalisme et de défier la superpuissance américaine.
A quelques rares exceptions près, comme le démocrate Jimmy Carter (1977-1981), tous ont essayé de faire céder Cuba en renforçant les rétorsions économiques et commerciales ou en soutenant l'opposition en exil. En vain.
Avant les tentatives finalement réussies de Barack Obama, les approches secrètes, la diplomatie parallèle auxquelles se sont essayés de nombreux présidents américains n'avaient pas abouti. La question cubaine est rapidement devenue un enjeu de politique intérieure, le poids des exilés devenant déterminant, en particulier au Congrès.
- "Un tyran est mort" -
"Un tyran est mort et on est à l'aube d'un nouveau départ dans le dernier bastion communiste des Amériques", a ainsi proclamé la représentante républicaine de Floride, Ileana Ros-Lehtinen, d'origine cubaine, fustigeant également Raul Castro.
"La mort de Fidel Castro ne ramènera pas ses milliers de victimes, pas plus qu'elles n'apportera de réconfort à leurs familles", a renchéri le sénateur républicain Ted Cruz, ancien candidat à la primaire pour la présidentielle et également issue d'une famille d'immigrés cubains.
Mais du côté de l'administration démocrate de Barack Obama, le rapprochement avec Cuba restera, avec l'accord sur le nucléaire iranien, l'une de ses percées diplomatiques historiques.
Pour le président sortant, qui cèdera dans deux mois les clés de la Maison Blanche au républicain Donald Trump, l'objectif était de rendre irréversible le rapprochement avec La Havane.
"Notre intention a toujours été de créer une dynamique tout en étant conscients que le changement n'interviendrait pas du jour au lendemain", avait ainsi expliqué M. Obama en mars lors de sa visite sans précédent sur l'île communiste. Il avait reconnu "des divergences profondes sur les droits des l'homme et les libertés individuelles à Cuba" mais avait jugé "que venir ici serait le meilleur moyen de favoriser plus de changement".
Pas sûr toutefois que le président élu Trump soit du même avis. Samedi, il s'est borné à tweeter: "Fidel Castro est mort!"
Le milliardaire avait d'abord soutenu ce dégel, mais une fois en campagne pour le parti républicain, il avait émis des réserves, regrettant que le président Obama n'ait selon lui rien obtenu en échange des assouplissements à l'embargo consentis par la Maison Blanche.
En octobre, il avait même affirmé qu'il ferait "tout pour obtenir un accord solide" avec La Havane, laissant ainsi présager un retour en arrière.
Une perspective calamiteuse pour nombre de Cubains, qui ont vu le retour des compagnies aériennes et croisiéristes américains sur l'île, ainsi que la levée de quelques dispositions de l'embargo financier et commercial imposé à l'île depuis plus d'un demi-siècle.