L'Assemblée examine, un peu frustrée, le projet de loi olympique
L'Assemblée a entamé mercredi l'examen du projet de loi olympique Paris-2024, qui vise à introduire des dérogations aux règles d'urbanisme et d'affichage publicitaire pour être prêt à temps et répondre aux exigences du CIO, mais laisse les députés un peu frustrés sur leur possibilité de le modifier.
Devant deux artisans de l'obtention des Jeux de 2024, Guy Drut (membre du CIO) et Tony Estanguet, patron du comité d'organisation (Cojo), la quasi-totalité des orateurs se sont réjouis de l'organisation de ces JO. "Facteur de mobilisation nationale" et "chance incroyable de développement du sport", selon la ministre des Sports et double championne olympique à l'épée Laura Flessel.
"Nous avons six ans pour faire de ces Jeux une réussite", a exhorté l'ancienne ministre des Sports Marie-George Buffet (communiste), espérant "un rattrapage de territoires sous dotés" comme son département de Seine-Saint-Denis. Seul l'Insoumis Michel Larive a assumé de "détonner dans cette grande osmose devant un projet purement financier".
Mais tous ont regretté leurs "faibles marges de man?uvre" sur ce texte qui transcrit les engagements pris par la ville de Paris à l'égard du CIO, lequel finance les Jeux à hauteur de 1,4 milliard d'euros, un peu plus du tiers du budget du comité d'organisation (3,8 milliards d'euros en 2024).
"Sommes-nous là pour adopter in extenso un contrat dont ni le gouvernement ni le Parlement ne sont directement signataires ?", a déploré Brigitte Kuster (LR).
Laura Flessel a dit partager la frustration "d'un texte essentiellement technique" et promis de présenter "début 2019 un projet de loi +sport et société+ visant à encourager la pratique pour tous et partout, tout au long de la vie".
Le projet de loi prévoit, dans certains cas et jusqu'en 2024, de déroger à l'interdiction d'apposer de la publicité sur les monuments historiques ou sites classés, au profit des emblèmes olympiques. Et durant trois mois autour des compétitions, l'affichage des sponsors du CIO et des J0-2024 serait exceptionnellement autorisé sur les monuments historiques ou sites classés accueillant des compétitions, et dans un périmètre de 500 mètres autour.
- Paris, nouveau Las Vegas? -
L'association de défense du patrimoine Sites et monuments, qui dénonce déjà "un matraquage publicitaire", a dressé une liste des lieux potentiellement concernés, du Champ de Mars (volley) au Grand Palais (escrime, taekwondo).
"Il ne faut pas faire passer les sponsors avant le sport", s'est exclamé Maxime Minot (LR), craignant que "Paris ne soit un nouveau Las Vegas".
"Il ne s'agit pas de favoriser la publicité mais les deux tiers du jeu sont financés par des partenaires", a rappelé la rapporteure du projet, Aude Amadou (LREM), ancienne handballeuse professionnelle.
D'autres dispositions sont prévues pour accélérer et simplifier les procédures d'urbanisme ou d'expropriation, en vue de la construction en Seine-Saint-Denis des villages des athlètes et des médias, qui seront transformés en logement, ou la possibilité pour le gouvernement de réserver des voies de circulation pendant les jeux, par ordonnance.
"Sept ans, c'est long, mais dans l'urbanisme et le logement c'est parfois court", a plaidé le secrétaire d'Etat Julien Denormandie, qui a promis "de dépasser les carcans bureaucratiques pour être à l'heure", même si "95% des installations existent déjà ou seront provisoires"
Tous les groupes ont déposé des amendements pour éviter que les bénévoles, entre 45.000 et 70.000, ne soient soumis à des abus.
Enfin, un volet éthique et transparence prévoit un contrôle de la Cour des comptes et, pour les futurs patrons du Cojo, l'obligation de remettre leur déclaration d'intérêt et de patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (Hatvp).
Le groupe LREM veut aller plus loin et a déposé un amendement, contre l'avis du gouvernement, pour plafonner la rémunération des membres du Cojo à 268.000 euros brut annuels.
Tony Estanguet a cependant estimé mercredi que si les politiques avaient leur mot à dire sur les salaires des organisateurs des JO, la décision ne leur revenait pas, le comité d'organisation étant une structure privée.
La loi olympique, qui sera débattue au Sénat début février, devrait être adoptée définitivement au premier trimestre 2018.