Cinq indices qui montrent que la campagne de Manuel Valls ne se passe pas comme prévu
POLITIQUE - C'est un costume qu'il a du mal à enfiler et qu'il ne veut pas porter. Candidat de substitution depuis la renonciation de François Hollande, Manuel Valls est le favori de la primaire du PS bien que des sondages le donnent battu au second tour. Même s'il faut prendre ces enquêtes avec des pincettes, elles sont le signe d'une entrée en matière délicate.
Celui qui est redevenu député de l'Essonne s'est d'ailleurs montré très énervé contre les journalistes qui l'interrogeaient sur sa campagne qui patine. En déplacement dans le Puy-de-Dôme, mardi 10 janvier, il a critiqué la presse "qui pose toujours les mêmes questions". "Vous ne savez pas faire autre chose. Je ne répondrai plus à ces questions. Vous vous êtes trompés, pas que vous d'ailleurs, sur tous les pronostics passés, sur tous les scrutins qui ont eu lieu un peu partout dans le monde et en Europe (...) et en France aussi. Je n'aurai pas la cruauté de vous ressortir vos analyses et la Une d'un certain nombre de vos journaux concernant la primaire de la droite", a-t-il lancé.
A la veille du premier débat qui aura lieu jeudi 12 janvier sur TF1, Manuel Valls aurait pourtant tort de ne pas regarder de près ces quelques indices qui montrent que sa campagne ne se passe pas exactement comme prévu.
- Des déplacements chahutés
C'est peut-être l'image de ce début de campagne. En déplacement à Strasbourg à la fin du mois de décembre, Manuel Valls a été la cible d'un militant qui lui reprochait son changement de pied sur le 49-3. Alors qu'il rentrait dans un café, l'ancien premier ministre a été la cible d'un jet de farine. Une anecdote sans conséquence que l'intéressé a cherché à minimiser mais qui illustre ses difficultés. Le déplacement qu'il avait prévu en Bretagne lundi 16 janvier a par ailleurs été annulé; officiellement parce que Jean-Yves Le Drian est absent mais l'annulation est intervenue quelques heures après que FO a annoncé son intention d'organiser une manifestation pour perturber sa visite. Lors de son premier meeting, le 8 décembre dans le Doubs, il avait déjà été pris à partie par une militante.
- Des meetings qui ne font pas le plein
En attendant un grand meeting le 20 janvier à Paris pour clore la campagne de premier tour, Manuel Valls multiplie les réunions publiques en province pour distiller son projet. Problème pour l'ancien premier ministre: ces rencontres souffrent de la comparaison avec d'autres candidats de gauche. Illustration ce mardi 10 décembre puisque le député de l'Essonne n'est pas parvenu à remplir les 300 places du gymnase d'une petite commune du Puy-de-Dôme alors qu'au même moment Benoît Hamon laissait du monde sur le carreau pour son meeting dans l'Hérault. Dimanche déjà, Manuel Valls n'avait pas fait le plein dans le Nord tandis que son rival de l'aile gauche y parvenait dans les Landes. Et si l'on compare avec d'autres candidats à la présidentielle, l'image est encore moins favorable. Pendant que l'ancien chef du gouvernement peinait à Liévin, Jean-Luc Mélenchon "déboulait" avec plus de 1500 personnes à Tourcoing et Emmanuel Macron attirait environ 2000 personnes dans la Nièvre.
- Une "Emission politique" qui ne convainc pas
Contrairement à la plupart de ses rivaux, Manuel Valls a eu droit à deux heures d'émission en prime-time sur France 2. "L'Emission politique" dont il était l'invité jeudi 5 décembre était l'occasion pour l'ancien premier ministre de faire la différence et d'imprimer sa marque. Mais au-delà de l'audience qui a été meilleure que celle d'Arnaud Montebourg en septembre ou de Benoît Hamon en décembre, les téléspectateurs n'ont pas apprécié sa prestation. Seulement 29% ont été convaincus par Manuel Valls contre 33% pour l'ancien ministre du Redressement productif et 40% pour l'ex-ministre de l'Education, selon une enquête Harris Interactive. Chez les sympathisants de gauche, Manuel Valls n'a fait guère mieux. Il n'y a qu'auprès des sympathisants PS qu'il a réalisé un meilleur score; seulement, les 22 et 29 janvier, c'est tout le peuple de gauche qui est invité aux urnes.
- Des Hollandais qui ne se bousculent plus
Dès l'annonce de sa candidature, Manuel Valls a marqué de gros points en attirant à lui certains proches de François Hollande. Son directeur de campagne n'est autre que Didier Guillaume, hollandais historique et président du groupe PS au Sénat. Le député de l'Essonne a ensuite enregistré le soutien de Jean-Yves Le Drian, fidèle du Président ou de Najat Vallaud-Belkacem. Mais depuis, les ralliements ont cessé; au moins provisoirement. Stéphane Le Foll n'a par exemple pas rejoint le candidat Valls. Le chef de l'Etat lui-même n'est visiblement pas emballé par la campagne de son ancien premier ministre. Plusieurs médias (Le Monde et Le Canard Enchaîné) rapportent des propos pas tendres du président selon qui "Manuel Valls n'a pas de projet et tourne en rond". Ce qui n'empêche pas son lieutenant Luc Carvounas de toujours espérer un signe avant le premier tour.
"Je suis persuadé que @fhollande aura un mot en faveur de @manuelvalls d'ici la fin de la #Primaire" #TDinfos #Valls2017
— Luc Carvounas (@luccarvounas) 11 janvier 2017
- Une stratégie qui a ses limites
Coincé sur l'aile droite du PS, Manuel Valls cherche à se recentrer dans cette campagne pour apparaître comme rassembleur. Mais cette stratégie se heurte au quinquennat qui vient de s'écouler. "On le sent coincé dans ses propres contradictions, la plus flagrante est le 49-3", dit une proche de Vincent Peillon. Le candidat Valls a ainsi proposé de supprimer l'article 49-3 de la Constitution alors même qu'il le justifiait comme un outil d'efficacité pour faire passer les lois Macron et El Khomri quand il était à Matignon. "Il dit qu'il a changé. Alors oui je pense qu'on peut changer mais il y a des changements qui se font tellement rapidement qu'on peut se demander s'ils sont crédibles", assure un lieutenant de Benoît Hamon. Mais celui-ci imagine tout de même l'ancien premier ministre se qualifier pour le second tour. "Il y a un vrai socle autour de lui et ce serait logique qu'on ait un affrontement entre deux lignes politiques".
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