Le démarchage téléphonique est "un fléau" dénoncent neuf associations de consommateurs
Neuf associations de consommateurs lancent une pétition contre le démarchage téléphonique, "pratique intrusive" devenue un fléau national.
La recrudescence du démarchage téléphonique, matin, midi et soir, met les Français en boule. L’exaspération est à son comble comme en témoignent les 200.000 signatures en deux jours enregistrées sur le site de l’UFC-Que Choisir. La pétition soutenue par neuf associations – l’ADEIC, l’AFOC, l’ALLDC, la CSF, le CNAFAL, la CLCV, Famille Rurales, l’UFC-Que Choisir et l’UNAF – exige des pouvoirs publics de "couper court" à cette pratique "toxique".
Exaspération généraliséeL’un veut vous vendre de l’isolation pour vos combles, l’autre installer des panneaux photovoltaïques sur votre toit, le troisième vous propose des assurances, le quatrième, des complémentaires santé… Ces appels intempestifs, qui encombrent les lignes fixes essentiellement à l’heure des repas, 92 % des Français les jugent au bas mot "agaçants" et "trop fréquents", selon un sondage Opinionway (juin 2018).
"Ça suffit !", résume Alain Bazot, le président national de l’UFC-Que Choisir. Outre une intrusion caractérisée, brisant la tranquillité à l’heure du déjeuner ou du dîner, l’association de consommateurs pointe du doigt les conséquences financières.
"Les litiges qui nous occupent le plus, avec des montants qui peuvent être significatifs, ce sont précisément les secteurs où le démarchage téléphonique prolifère, renseigne Alain Bazot. Cette technique prend les gens de court, les bouscule, elle est invasive et agressive, encore plus pour les personnes vulnérables qui ne savent pas comment se dépêtrer de ces appels insistants. Au final, ils procèdent trop souvent à des travaux dont ils n’ont pas besoin quand ils ne sont pas tout simplement abusés."
Opt-in et opt-outLa pétition demande précisément d’interdire ces appels non désirés. "Sur ce principe, les consommateurs qui acceptent d’être démarchés le font savoir. C’est ce qu’on appelle le opt-in, explique Alain Bazot. Autrement dit : qui ne dit mot, ne consent pas. C’est ce qui se passe d’ailleurs pour les courriels et les SMS : il faut une autorisation préalable."
Le système de l’opt-in est appliqué, avec succès, depuis belle lurette dans plusieurs pays dont l’Allemagne, et le Royaume-Uni vient de l’adopter. En France, si le citoyen n’a pas dit "non", c’est le "oui" qui s’impose automatiquement selon le principe du opt-out.
Remède inefficaceDepuis mi-2016, chacun peut s’opposer au démarchage téléphonique en inscrivant son numéro au fichier national Bloctel. Sans succès la plupart du temps. "Les 3,7 millions d’utilisateurs constatent chaque jour son inefficacité", dénoncent les associations de consommateurs. En cause : "des sanctions dérisoires et beaucoup trop de dérogations" pour les "fauteurs de troubles".
Qu’est-ce qui coince ?Pourquoi la France persiste-t-elle à cautionner le opt-out ? "On nous répond par un enfumage sur l’emploi, comme si passer à l’opt-in allait détruire toute une filière. En somme, il faudrait que le citoyen continue à être harcelé pendant ses repas et ses siestes pour faire prospérer un business sur son dos ! C’est surréaliste", s’indigne le président de l’UFC-Que Choisir.
Alors que la proposition de loi sur le démarchage téléphonique sera débattue le 30 janvier à l’Assemblée nationale, le secteur du bâtiment a décidé de mettre tout son poids dans la balance. Ses principales fédérations ont demandé mardi au gouvernement d’interdire le démarchage téléphonique en matière de rénovation énergétique, accusant certaines plateformes de harceler et d’induire en erreur les particuliers.
Nathalie Van Praagh