La pharmacie Ducher : aux petits soins des Clermontois de père en fils depuis quarante ans

"Mes confrères m’avaient prédit que je ne tiendrai pas six mois et ça fait quarante ans que ça dure. Ça répond à un réel besoin", sourit Philippe Ducher. Rapidement après avoir racheté l’officine située au 1 place Delille, à Clermont-Ferrand, en février 1984, le pharmacien se lance dans une ouverture non-stop, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. En France, ils sont moins d’une trentaine.

"La journée, nous sommes une pharmacie de quartier avec des habitués et des malades chroniques. La nuit, comme les dimanches ou les jours fériés, on répond à l’urgence pour les accidents, la traumatologie du sport, les épidémies."

Et, contrairement à ce qu’on pourrait croire, "la nuit, on n’a pas tant de problèmes d’incivilités. Les gens sont relativement gentils, compréhensifs et bienveillants. Ils savent quel service on leur rend", note Philippe Ducher.

Le service, justement, a toujours été le moteur du pharmacien pour développer son entreprise. D’un côté en élargissant son offre au matériel d’orthopédie dès 1986. De l’autre en augmentant son volume d’activité par l’absorption des autres officines de la place Delille : en 2006 celle du numéro 4 – aujourd’hui devenue une supérette Carrefour – et en 2015 celle du numéro 13 à la devanture en mosaïque inspirée de l’histoire égyptienne qui abrite actuellement un cabinet dentaire.

La pharmacie Ducher a absorbé en 2015 l'activité de l'officine située au 13 place Delille, un établissement fondé par Léon Gros, professeur à l’Ecole de médecine et de pharmacie de Clermont-Ferrand et passionné par la civilisation égyptienne qui avait fait réaliser en 1921 une devanture originale encore visible aujourd’hui.  Photo Thierry Lindauer

Un esprit de compagnonnage

Pour assurer ce fonctionnement atypique, pas moins d’une vingtaine de salariés sont nécessaires. Jérôme Ducher détaille : "Nous avons une secrétaire administrative, six pharmaciens assistants, quatre à cinq préparateurs et une dizaine d’étudiants de la troisième à la sixième année que nous formons sur le principe du compagnonnage. Les plus jeunes apprennent au contact de leurs aînés et des professionnels. Ils sont formés, ils forment puis ils deviennent pharmaciens de nuit. Seuls aux commandes, ils doivent gérer tous types de prescriptions et de situations, c’est très formateur."

Une transmission en douceur

Avant de succéder à son père en 2018, le quinquagénaire a fait ses classes dans l’industrie, à Paris puis en Angleterre, "pour voir autre chose et acquérir la légitimité d’être responsable d’une pharmacie".

Philippe Ducher a cédé à son fils Jérôme la gestion de la pharmacie place Delille.

De retour en Auvergne, Jérôme intègre l’entreprise familiale qui emploie 118 salariés. Infatigable entrepreneur, Philippe a créé un groupe diversifié qui compte notamment quatre officines, deux à Clermont-Ferrand et deux à Vichy. "Avec mon père, on a choisi de travailler ensemble à Clermont mais pas au même endroit, lui à Montalambert et moi à Delille", pointe Jérôme de sa voix calme.

Des services mutualisés

Autonome dans sa gestion, le fils met en avant l’intérêt, au sein de la société familiale, des services mutualisés (achats, gestion des stocks, comptabilité…) et des process identiques à l’image du système de robotisation qui permet d’acheminer les médicaments de l’espace de stockage au plus près de chaque collaborateur pour réduire l’attente et améliorer le service.

"Cette organisation permet à des collaborateurs de rester dans l’entreprise en changeant de site ou de poste. Nous avons des préparatrices qui sont devenues responsables des achats ou spécialiste dans l’orthopédie", détaille Jérôme.

1.049 passages le 31 décembre dernier

Très attaché à la transmission, c’est lui qui a décidé d’afficher sur la vitrine le nombre de collaborateurs passés par la place Delille en 40 ans : 80 préparateurs, 130 étudiants et 180 pharmaciens. Des chiffres impressionnants tout comme le nombre de patients accueillis chaque jour : entre 450 et 500 en semaine dont la moitié entre 18 heures et 23 heures et une vingtaine en "nuit profonde", entre minuit et 8 heures, avec des pics de fréquentation le dimanche autour de 800 personnes et un record le 31 décembre dernier avec 1.049 passages.

C’est donc peu dire qu’au fil des années, la pharmacie s’est fait une place à part dans le quotidien des Clermontois et bien au-delà puisqu’elle assure des gardes pour plus d’une trentaine de communes allant d’Orcines à Billom et d’Aigueperse à Romagnat.

Maud Turcan