La gestion des stocks pendant le confinement : un casse-tête pour les petits commerces de Clermont-Ferrand

« Nous avons fait rentrer nos stocks. Nous les avons payés. Et on ne peut pas les écouler ! » Dans sa boutique située près de la place de la Victoire, la gérante de Toutes les filles en parlent, Ghyslaine Antony, résume la problématique à laquelle font face les petits commerçants indépendants. À l’image d’Audrey Fontbonne, à la tête des trois boutiques Jalouse(s), rue Saint-Genès. Les deux femmes expliquent le fonctionnement de leurs magasins, et du coup les difficultés qu’elles rencontrent.

Des achats de collection bien en amont

Pour ces boutiques, les stocks sont réalisés très largement en amont. « Je fais les salons, les showrooms, un an avant. Et je commande à ce moment-là !, explique Audrey Fontbonne. Tous les stocks appartiennent à ma société. » « C’est la différence avec les franchises, ajoute Ghyslaine Antony. Elles ne payent que la marchandise qu’elles vendent. Elles n’ont pas à sortir de trésorerie. Nous, c’est notre argent. Et il est immobilisé. » Et que ce soit pour les vêtements ou les chaussures, il faut à chaque fois plusieurs pièces, afin de proposer les tailles nécessaires.  

Le maquillage, victime collatérale du Covid

Des confinements tombés à des débuts de saison

Mars 2020. Novembre 2020. Avril 2021. « Les confinements ont été annoncés au démarrage des saisons. Aux meilleurs mois pour la vente », se désole Ghyslaine Antony. Et Audrey Fontbonne de donner des exemples parlants.

« J’ai loupé ma saison de boots cet hiver. En septembre, je vendais encore beaucoup de baskets. Puis quand on a rouvert pour les fêtes, mes clientes étaient dans une autre optique, celle de cadeaux. J’ai raté aussi les gros pulls, un peu conséquents en termes de prix, car les clientes étaient chez elles, n’avaient pas besoin d’acheter. » 

En effet, le télétravail est venu s’ajouter à ces phénomènes. Ainsi que la suspension des mariages, des fêtes… « Les femmes ont moins besoin de s’habiller.»Ghyslaine Antony, de Toutes les filles en parlent 

Que faire des stocks qui s’entassent ? Solder de suite ?

La réponse des deux commerçantes est identique : non ! « On nous parle d’avancer les périodes de soldes. C’est bien beau tout cela. Mais nous, il faut qu’on se fasse une marge. Car nous n’avons pas que la marchandise à payer, insiste la gérante de Toutes les filles en parlent. Nous avons aussi tous nos frais. » Une position d’autant plus difficile à tenir face à la concurrence de grandes enseignes. « Dès que les commerces pourront rouvrir, certains feront des grosses réductions. Moi, je ne peux pas solder des choses que mes clientes n’ont même pas vues !, s’exclame Audrey Fontbonne. Des -30, -40 %, je suis dans l’incapacité financière de les faire. Sinon, je ferme. »

Alors quelles solutions ?

Déjà, espérer que les clients seront au rendez-vous au moment de la réouverture. Ensuite, certains produits seront soldés lors des dates officielles. Enfin, d’autres attendront le prochain hiver ou le prochain printemps pour retrouver leur place sur les cintres.Audrey Fontbonne, de Jalouse(s) « Je fonctionne différemment désormais, reconnaît la gérante de Jalouse(s). Par exemple sur certains articles que j’avais rentrés très tard et que je n’avais pas eu le temps de faire voir à mes clientes. J’ai fait le choix de garder les séries complètes et de les repasser en nouvelle collection. Il y a aussi des choses un peu intemporelles, que nous pouvons remettre d’une une année sur l’autre. C’est le cas de mes robes noires. J’ai décidé ne pas en recommander d’autres. Je les ressortirai l’hiver prochain. »

Marion Chavot