Pourquoi le Val d'Allier serait-il labellisé par l'Unesco ?
Créé en 1992, le conservatoire d’espaces naturels de l’Allier (CEN 03) œuvre pour une préservation du patrimoine naturel aux travers d’actions impliquant propriétaires, usagers, collectivités, services de l’État. Autant dire que la concertation est une pierre angulaire de l’association, c’est tout du moins l’un des axes de travail de la directrice Estelle Cournez et de la nouvelle présidente, Christiane Louveton.
Le val d’Allier, de Vichy à Nevers, étant une colonne vertébrale de notre région et les activités de plein air ayant le vent en poupe, l’idée que la préservation ne freine pas les activités socio-économiques a convaincu l’équipe du CEN de candidater à une labellisation Ramsar sous l’égide de l’Unesco, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.
De quoi s’agit-il exactement ?La Convention relative aux zones humides d’importance internationale, appelée Convention de Ramsar, a été adoptée le 2 février 1971 à Ramsar, en Iran.À l’origine, ce réseau a été établi en faveur de la conservation des oiseaux d’eau. Depuis, il est en constante extension à travers le monde pour gérer durablement les milieux humides au patrimoine écologique inestimable. La France a ratifié la Convention de Ramsar en 1986 et a labellisé à ce jour 50 sites Ramsar s’étendant sur une superficie de plus de 3,7 millions d’hectares.
Le dossier de labellisation sera déposé en 2022« Pour être labellisé Ramsar, le site doit répondre à au moins l’un des neuf critères. De Vichy au bec d’Allier dans la Nièvre, notre rivière et ses abords, sa flore et sa faune, répondent à sept des critères. Nous avons donc tout pour prétendre à la labellisation », déclare Estelle Cournez.
Mais alors, pourquoi candidater seulement maintenant ?« Il y a différentes dynamiques de préservation et de valorisation de la rivière Allier qui se mettent en place ou sont déjà en œuvre, il est temps de les coordonner », résume la naturaliste.« Par exemple, la communauté d’agglomération de Moulins porte le projet de créer une maison de la rivière, dans d’anciens locaux techniques, à l’entrée du pont Regemortes. L'idée est qu'elle devienne complémentaire de la maison de la batellerie de Château-sur-Allier ou de l’observatoire de la passe à poissons de Vichy.»
Comment s’organise la demande de labellisation ?La démarche coordonnée par le CEN Allier et qui implique des collectivités du Cher et de la Nièvre a été lancée officiellement en décembre dernier. Une réunion (en visio) supervisée par la préfecture de l’Allier a réuni une cinquantaine de personnes, dont des députés et sénateurs de l’Allier, du Cher et de la Nièvre.
« J’ai senti un intérêt commun dans l'Allier, l’ambiance était studieuse et positive. Ailleurs, j’ai déjà vu des résistances purement politiciennes ou des incompréhensions »
En début d’année, deux cents structures ont été invitées à rejoindre le comité de préfiguration. « La première réunion doit avoir lieu en ce mois de mars. L’objectif est d’écrire un projet de territoire du val d’Allier, que l’on raconte tous la même histoire, d’ici la fin de l’année. Puis nous déposerons le dossier de labellisation en 2022 », détaille Estelle Cournez.
Les questions à aborder sont multiples :Comment encourager la pratique du canoë, tout en protégeant les oiseaux nicheurs au sol dans les bancs de sable ?Peut-on créer des points de vue sur la rivière d’analyse du paysage, par exemple à Châtel ou à Monetay ? Quelles coordinations avec les chemins de randonnées ? Quelle pratique du pâturage le long des méandres ?
Ramsar n’est pas un outil de réglementation supplémentaire, « c’est une règle du jeu. Ce label affirme une volonté collective et devient un point de repère pour les financeurs comme l’Agence de l’eau ou l’Europe », déclare Jérôme Bignon.
L’exemple de la rivière SommeAlors que la majorité des sites Ramsar en France concerne des bords de mer, le président de Ramsar France a participé à la labellisation de celui de la baie de Somme, d’où il est originaire.« Les gens ne se promenaient pas le long de la Somme. La fréquentation était concentrée dans la baie, nous voulions qu’elle se déploie plus largement relate Jérôme Bignon. Nous nous sommes fixés plusieurs objectifs : consolider le chemin de halage, transformer une maison d’éclusier, développer la pratique du canoë en aménageant des points de halte, développer la pratique du vélo tout terrain et du vélo électrique, poser des caméras aquatiques pour observer les poissons…Nous avons d’ailleurs pu prouver le retour du saumon l’an dernier !En résumé, ce n’ont pas été des investissements considérables, mais la cohérence du projet a permis que tous, habitants ou touristes, puissent profiter de la nature, pas seulement sur la côte, et ça, c’est formidable. »
Stéphanie Ménastephanie.mena@centrefrance.com
Réaction :Le maire de Vichy est l’un des élus mobilisés pour la labellisation du val d’Allier :« Cela permettra de renforcer la mobilisation des acteurs autour des enjeux de préservation et de développement de l’axe Allier, notamment en générant un tourisme “nature”. Le Val d’Allier mérite de bénéficier de ce statut compte tenu de la dynamique naturelle de la rivière et de sa richesse écologique et du fait qu’il abrite, par exemple, davantage d’espèces d’oiseaux que la Camargue. »
Un héron cendré dans la réserve naturelle du Val d'Allier oiseaux. Photo : François-Xavier Gutton
Un petit gravelot dans la réserve naturelle du Val d'Allier. Photo : François-Xavier GuttonCertains oiseaux nichent au sol ou dans les falaises de sable le long de la rivièreCamping sauvage le long de la rivière allier à Montilly