Ma vie à deux pas du campement sauvage des gens du voyage à La Souterraine (Creuse)
Dans la zone commerciale René-Batier et le quartier de la rue Henri-Pluyaud qui borde le campement sauvage des gens du voyage, la population vit dans l’angoisse en attendant l’expulsion des squatteurs. La municipalité vient de déposer un référé au tribunal judiciaire dans ce sens.
Le jeudi, certaines caravanes ont disparu mais une dizaine reste encore présente sur le parking de l’ancien Aldi de La Souterraine, au cœur de la zone commerciale René-Batier et en bordure d’un quartier résidentiel.
La peur des habitantsJuste en face de ce campement illégal, les gens du voyage ont branché leur tuyau à la borne à incendie, une installation de fortune qui est en train de fuir, pour le plus grand désespoir des riverains, comme ce couple de retraités qui ne comprend pas « qu’en pleine sécheresse, on les laisse voler de l’eau en toute impunité. Il y a aussi les nuisances sonores, avec les cris, les bagarres avec ceux qui sont installés dans les immeubles d’à côté, les chiens qui aboient la nuit et le coq à 4 heures du matin. » Le couple a peur car une propriétaire qui venait faire visiter un appartement s’est faite agresser.
Le maire de La Souterraine (Creuse) veut obliger l'Etat à intervenir (17/04/2019)
Un autre voisin explique qu’il essaye de ne pas les croiser, surtout après le feu de haie et l’agression du pompier mardi soir. « C’est pas facile. Ils me font penser à des caïds qui bombent le torse… Et dès qu’ils vous voient vous devenez la proie. »Pourtant, Bernard Audousset, l’adjoint en charge des travaux et du « bien vivre sostranien » raconte que la situation n’a pas toujours été aussi sombre.
« Avant, certaines caravanes s’installaient quinze jours et repartaient mais il y avait des discussions et pas de violence. » Le problème : c’est cette friche industrielle. « Car le propriétaire de l’ancien Aldi, qui a déménagé il y a trois ans, a dit aux élus qu’il allait porter plainte dès le mois de novembre, au moment de leur installation, mais il ne l’a toujours pas fait. »
Toute une zone commerciale en périlCe qui ne rassure pas Julie qui a monté son entreprise juste à côté, il y a trois ans. « Des propositions d’achat lui ont été faites mais ce propriétaire ne semble pas avoir envie de vendre. »
Ce qui agace le plus Julie c’est que les gens du voyage qui squattent ce terrain effraient sa clientèle. Une clientèle souvent âgée et fragile.
« Il y a ceux qui n’osent plus se déplacer. Quant à ceux qui viennent, ils me demandent s’ils peuvent laisser leurs voitures devant ! » La jeune femme se sent surveillée. Épiée. Elle est même insultée. Julie rêverait que cette friche industrielle redevienne un lieu de vie.
« J’ai une entreprise qui fonctionne, je ne veux pas que mon commerce coule. » L’un de ses voisins artisan explique qu’il doit composer avec des portions vertes qui sont devenues de vrais dépotoirs. « Déjà que la zone n’est pas en très bon état, je pense à la route surtout, ça n’est pas très engageant pour les clients. » L’artisan ne comprend pas pourquoi après autant d’incivilités et d’agressions, les forces de l’ordre n’interviennent pas.
Interrogée, la préfète précise en deux lignes qu’elle « ne répondra pas à un maire par voie de presse, qui a tous les éléments de fait et de droit sur cette situation »
Virginie Mayet
La communauté des gens du voyage craint l'amalgame. À l’aire d’accueil des gens du voyage, comme ailleurs, on dénonce les agissements de « mauvaises personnes » qui risquent de porter tort à toute une communauté. Denis, pasteur installé ici avec sa famille, se sent obligé de préciser : « nous, on n’a rien à voir avec les autres. Moi je suis pasteur et dans l’évangile est gravé le respect de la personne. Depuis des années qu’on vient ici, on n’a jamais eu aucun souci sur cette aire. Tout se passe bien. » Même si un problème inquiète Denis : la place. Avec les enfants qui se marient, la famille qui s’agrandit, il craint de manquer de place. Se sédentariser un peu, enfin pas construire une maison pour perdre sa liberté, mais rester plusieurs mois sur un terrain assez grand pour accueillir toute sa famille, il y songe… « Vous savez, on a une bonne vie quand même. Il suffit de bien comprendre le sens de la vie, qu’avec le minimum, on peut vivre et être heureux. »